lundi 22 juin 2009

A propos des obsèques d'Omar Bongo et de celles de Leopold Senghor

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Voici quelques remarques très pertinentes que m'envoie un copain:

A propos des obsèques d'Omar Bongo.

J'ai écouté à France Inter qu'assistaient à ces obsèques l'actuel président de la République Nicolas Sarkozy, son prédécesseur Jacques Chirac, le ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner, le secrétaire d'Etat à la Coopération Alain Joyandet, les anciens ministres Michel Roussin, Jean-Louis Debré et Jacques Godfrain.

Ainsi, pour ce "parrain" africain corrompu et corrupteur, ancien agent secret, dictateur, mouillé jusqu'au cou dans la Françafrique, manipulé (par Jacques Foccart) et manipulateur, la France n'a pas dépêché moins de deux chefs d'Etat, deux ministres - dont un de premier rang - et trois anciens ministres.

Le 30 décembre 2001, pour les obsèques de Léopold Sedar Senghor, ancien condisciple de Georges Pompidou, prédécesseur de Jacques Chirac à la même fonction et soutenu par le même parti, agrégé de grammaire, député français, ministre de la République française, membre de l'Académie française, écrivain français de réputation internationale... ni le président de la République Jacques Chirac ni le premier ministre Lionel Jospin n'avaient daigné se déplacer. Le "plus ancien dans le grade le plus élevé" (comme on dit) à représenter la France était Raymond Forni, président de l'Assemblée national (au 4e rang dans l'ordre des préséances pour les cérémonies publiques...).


Pour un pays de 1,5 millions d'habitants, dont le président était un dictateur notoire, la France a déplacé trois personnalités de premier rang. Pour un pays de 13 millions d'habitants, dont le président avait été aux tout premiers rangs de la France dans l'ordre de l'esprit et dans l'ordre de la politique, la France a offert des pièces jaunes.

On ne saurait mieux dire dans quel terreau s'enracine le discours de Sarkozy à Dakar, en juillet 2007, et quels jours heureux la Françafrique a encore devant elle. Aux obsèques d'Omar Bongo, le 16 juin 2009, la France, pour la deuxième fois, a enterré Léopold Sedar Senghor...

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2009 : 16 ordinations chez les Pères Blancs

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ROME, Lundi 22 juin 2009 (ZENIT.org) - En ce début d'année sacerdotale, les Missionnaires d'Afrique (Pères Blancs) ont annoncé l'ordination presbytérale de 16 jeunes membres de cette société, entre mai et septembre 2009.

Ces jeunes sont originaires d'Inde, de Pologne, de l'Ouganda, de Tanzanie, de Zambie, de République Démocratique du Congo, du Burkina Faso et du Ghana.

En 2010, ce sont 24 jeunes en formation dans les maisons de la Société à Nairobi (Kenya), à Abidjan (Côte d'Ivoire), à Kinshasa (République Démocratique du Congo) et à Jérusalem, qui se prépareront à recevoir le ministère sacerdotal en vue du service missionnaire dans le monde africain.

Nous vous invitons à vous unir à notre action de grâce pour ces belles moissons et à prier pour ces futurs missionnaires afin qu'ils soient « des apôtres et rien que des apôtres » (cardinal Lavigerie, fondateur des Missionnaires d'Afrique), affirme dans un communiqué le père Dominique Arnauld M.Afr., Secrétaire à la Formation Initiale.

La Société des Missionnaires d'Afrique (Pères Blancs) est née en Algérie, fondée en 1868 par Mgr Charles Lavigerie, archevêque d'Alger, qui les incite très rapidement à parler la langue du pays, manger leur nourriture et porter leurs habits.

Leur surnom populaire de « Pères Blancs » vient de cet habit qu'ils garderont ensuite en s'enfonçant au cœur du continent africain : l'habit arabe, composé de la gandoura, du burnous et de la chéchia, avec comme signe religieux un rosaire porté autour du cou comme collier.

Oeuvres sociale, dispensaires, écoles, développement rural : tel sera leur travail, au début, en Algérie, puis dans toute l'Afrique.

A la mort du cardinal Lavigerie, en 1892, 278 Missionnaires d'Afrique, de 5 Nationalités travaillaient déjà dans 6 pays : Algérie, Tunisie, Uganda, Tanzanie, Congo et Zambie.

Aujourd'hui, on compte 1 684 Missionnaires d'Afrique, de 36 nationalités, qui travaillent dans 42 pays, dans 310 communautés.

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samedi 13 juin 2009

dernière "interwiew" au Burkina

PERE JACQUES LACOUR

"Droit dans les yeux faisait partie de ma vie"
mardi 9 juin 2009, page visitée 313 fois

Le 22 mai 2009, la direction du journal a offert un pot d’au revoir au Père Jacques Lacour, un collaborateur et animateur de la rubrique hebdomadaire "Droit dans les yeux" et qui également était en fin de mission au Burkina. A l’issue du pot, l’équipe de la rédaction a reçu ce missionnaire des Pères blancs d’Afrique pour un dernier entretien au cours duquel plusieurs questions lui ont été posées. De ses plus beaux souvenirs à sa retraite en passant par l’animation de la rubrique, son point de vue sur les problèmes liés au développement du Burkina, la nomination de Mgr Philippe Ouédraogo, l’élection du président américain Barack Obama, etc., ce sont autant de sujets évoqués dans un entretien de plus d’une demie heure avec Père Jacques Lacour.

"Le Pays" : Vous voilà, à la fin de votre séjour au Burkina. Que retenez-vous comme plus beaux souvenirs de ce pays ?

Père Jacques Lacour : Mes beaux souvenirs du Burkina sont innombrables. Je ne peux pas dire qu’il y en a un, mais beaucoup. En particulier, ce sont toutes les rencontres que j’ai faites avec les uns et les autres et qui m’ont beaucoup marquées. Cela a commencé, à cause de mon ministère paroissial, avec tous les catéchistes, ces gens qui passent par couple dans un village, pour témoigner de leur vie chrétienne. Là, j’ai vu des exemples merveilleux de gens capables de vivre des choses extrêmement profondes et capables de témoigner très fort de ce qui les habitait et cela m’a donné une très grande confiance dans les gens du Burkina. Je peux dire que j’ai d’abord aimé les Burkinabè à travers les premiers catéchistes que j’ai rencontrés, en étant vraiment sûr que dans ce beau pays, il y a des gens de conviction, des gens capables de témoigner, de gouverner. J’ai trouvé cela extraordinaire.

Vous avez remplacé le Père Balemans (qui est rentré définitivement chez lui en Hollande en février 2007 après plus de 50 ans passés au Burkina) pour animer la rubrique hebdomadaire "Droit dans les yeux". Dites-nous, comment s’est fait le passage de témoin ?

Vous savez que Père Balemans a décidé assez rapidement, en raison de sa santé, de partir. Avant de partir, il m’a dit "Jacques, je sais que toi, tu peux faire ça". J’ai répondu que oui mais auparavant, on devait en parler à nos supérieurs. Ce qui fut fait et ceux-ci m’ont donné mandat de continuer le travail de Père Balemans. C’était aussi simple que cela. J’ai toujours fait ce travail avec joie, avec conviction. J’aimais faire ce travail, être une sorte de témoin, de reflet de tout ce qui se passe dans la société burkinabè.

Au regard du ton que vous employiez dans vos articles, ne vous est-il pas arrivé de rencontrer des difficultés particulières ?

Il y a eu une seule fois, quand j’ai parlé de la route Koudougou / Dédougou, que des gens de Ouagadougou sont descendus chez moi. Je leur ai dit que, si je me suis trompé, ils n’avaient qu’à faire un démenti, un droit de réponse pour dire que le Père Jacques Lacour s’est trompé. Ils m’ont fait comprendre que ce n’est pas de cette façon que l’on travaille au Burkina. Ils m’ont alors demandé d’écrire un article dans lequel je rapporterai ce qu’ils m’ont dit. J’ai accepté de faire cet article à condition d’employer l’expression "disent-ils". Ce qui signifie que ce serait leur parole contre la mienne. Il n’y a pas eu de bagarre, notre rencontre s’est bien terminée et j’ai écrit un article en réponse. En dehors de cela, il n’y a jamais eu de droit de réponse à un de mes écrits ou de menace de la part des autorités.

Ne pensez-vous pas avoir été trop dur ?

Non pas du tout. Je pense qu’il y a un certain nombre de gens dans ce pays qui font des choses et cela doit être pointé clairement parce qu’il y a des choses qui sont anormales. Je ne pense pas avoir été dur.

Ne vous a-t-on pas critiqué de rouler pour l’opposition ou d’écrire des articles politiques ?

J’ai souvent précisé très clairement que je ne sers ni l’argent ni le pouvoir ni quoi que ce soit. Je ne sers que mes autres engagements complémentaires et le Forum social du Burkina ainsi que le réseau Justice et Paix des instituts religieux au Burkina. Ce que je fais c’est avoir un regard sur le Burkina qui permette d’être la voix des sans voix, de dénoncer les injustices, de dire là où il faut faire des efforts pour que les plus pauvres puissent s’en sortir. Ce sont là les seules convictions qui m’ont fait bouger, jamais de conviction politique.

A travers vos écrits et ceux du Père Balemans, on est tenté de croire que c’est une spécialité chez les pères blancs que de dénoncer...

Ce n’est pas une spécialité de dénoncer mais, nous avons l’avantage d’avoir au Burkina une communauté à Koudougou qui a comme objectif, justice et paix. Un jeune vient d’arriver dans cette communauté, dont la spécialité est la gestion du conflit. Il a beaucoup travaillé en Côte d’Ivoire, au niveau universitaire. Mais il arrive à Koudougou et il fait cette spécialité. Le Père Maurice Oudet que vous connaissez bien est lui, sur le monde paysan. Notre mission est de porter un message de justice et de paix.

Comment recueilliez-vous vos informations ?

Dès que vous commencez à écrire quelque chose, les gens viennent vous entretenir de certaines choses et, la plupart du temps, je leur demande s’ils acceptent que je fasse un article avec ce qu’ils m’ont dit. Beaucoup ne sont pas d’accord. Des informations, j’en avais beaucoup mais des informations utilisables, il y en a beaucoup moins. Les gens refusent qu’on utilise leurs témoignages. J’ai parlé il n’y a pas longtemps par exemple avec un groupe de Canadiens et de jeunes burkinabè des problèmes fonciers. Au Burkina, un certain nombre de puissants, de riches proches du pouvoir sont en train d’acheter des terres aux paysans et il est cité un cas où un ministre a même fait dégommer un haut fonctionnaire pour faire pression sur lui pour que ses parents lui vendent des terres. On a refusé que je publie un article sur cela. C’est pour vous dire qu’il y a des exemples très clairs où il y a des pressions ignobles qui se font aujourd’hui par les puissants qui veulent s’accaparer les terres du Burkina. Comment dénoncer cela ? Parfois on est obligé de le faire de façon générique.

Comment faites-vous le choix des thèmes ? Y a-t-il des gens qui vous les soufflent ou comment cela se passe-t-il ?

La plupart du temps c’est l’actualité. Je me rappelle qu’un jour il y a un de mes confrères avec lequel on parlait du rang du Burkina dans le classement du PNUD 176e/177. Il a dit que sur cette question le Père Balemans aurait fait un article. Ça m’a titillé et j’en ai fait un. Le plus souvent c’est l’actualité qui s’impose.

Parmi tous vos articles, quel est celui qui a eu le plus d’écho, qui a suscité le plus de réactions ?

Il s’agit de l’article relatif à un groupe catholique a donné une réception à l’hôtel Indépendance à 15 000 F CFA par personne avec la messe comprise au moment de Noël et du nouvel an 2009. Là, je me suis fâché et j’ai fait un article qui a eu un énorme retentissement, qui a été repris dans une newsletter du Monde en France. Avec cet article, j’ai eu des réactions en quantité. C’était un point sensible qui a beaucoup fait mal ; c’était dans notre communauté catholique et les gens ont réagi très fortement dans un sens ou dans l’autre.

Comment le Père Balemans vous jugeait-il dans votre manière d’approcher la vérité ?

Un jour, le Père Balemans m’a envoyé sa réaction, concernant l’article sur les refondateurs où j’avais dit qu’une refondation suppose un autre programme, d’autres alliances, d’autres personnes, etc. Et là, Balemans m’a dit que j’allais un peu fort. Il n’y a pas eu un seul article où je n’ai pas eu de réaction. A tous les articles il y avait ne serait-ce qu’une réaction, soit sur mon mail direct, le Fasonet, soit à celui du journal, etc. Toutes étaient favorables sauf exception et cela m’a étonné et m’a amené à croire que ceux-là qui ne sont pas d’accord avec moi se taisent peut-être à cause de l’expérience publique de Mgr Séraphin Rouamba (NDLR : évêque de Koupèla) avec le Père Balemans à propos d’un article de ce dernier. Ceux qui se permettaient de critiquer trop verbalement Père Balemans s’en sont pris plein la figure. Je pense donc que les gens ont été prudents après pour critiquer.

Comment vous y preniez-vous avec l’animation de la rubrique par rapport à vos multiples occupations, l’Eglise, le Forum social... ?

Ce qu’il y a, c’est qu’un article, ça m’habite. Je ne sais pas si c’est en rapport avec ma façon de travailler mais quand il y a une idée qui germe, je fais une recherche internet et je laisse l’idée faire son chemin. Mais quelquefois, il faut que l’idée m’habite pendant un certain temps, huit jours, quinze jours. C’est ma façon de travailler et ça marche bien. Il m’arrive de me réveiller la nuit et d’y penser. La rubrique faisait partie de ma vie et maintenant que cela va s’arrêter, je vais sentir un petit vide.

Le Père Balemans, avant de partir, vous avait désigné pour lui succéder. Avez-vous pensé vous aussi à quelqu’un pour vous remplacer ?

J’ai cherché, mes supérieurs aussi. On a visé au moins quatre noms mais ces personnes n’ont pas accepté peut-être parce que cela demande du temps, ou c’est le ton de la rubrique qui ne leur convient pas, ou ils n’ont pas envie de s’impliquer dans une aventure comme celle-là.

Vous avez appris à connaître la presse burkinabè dans son ensemble. Comment appréciez-vous le travail qui est fait dans les autres organes ?

Soyons clairs. Sidwaya, c’est son travail de soutenir le gouvernement, les actions du CDP. De ce fait, il est en exergue et nous l’avons bien compris. L’autre presse, j’entends par là "Le Pays", "L’Observateur", "L’Indépendant", "L’Evénement", etc., fait un excellent travail mais, on sent qu’il reste une peur, une autocensure. Sur certaines choses, vous n’allez pas jusqu’où il faut aller. Je me dis peut-être que le Burkina n’a pas encore assez les moyens d’un vrai journalisme d’investigation et c’est un peu dommage. Je me rappelle d’un article de votre journal sur le ciment qui allait quand même un peu plus loin. Osez aller jusqu’au bout, c’est important pour les citoyens.

L’archidiocèse de Ouagadougou a un nouvel archevêque en la personne de Mgr Philippe Ouédraogo. Qu’en pensez-vous ?

Vous n’imaginez pas ma joie quand j’ai appris cette nomination, pour plusieurs raisons. La première est que Mgr Philippe Ouédraogo est un ami. Nous avons travaillé ensemble dans le diocèse de Ouahigouya. Il m’a énormément soutenu et encouragé dans des moments difficiles quand je fondais la paroisse de Arbinda et cela a créé des liens forts entre nous. C’est un homme qui a beaucoup de discernement. Le ton va probablement changer et la distance raisonnable qu’il doit avoir vis-à-vis du pouvoir, je pense qu’elle sera respectée avec Mgr Philippe Ouédraogo. Je m’en réjouis.

Vous avez passé 28 ans au Burkina. Avez-vous pensé à la retraite ?

Dans ma famille, j’ai beaucoup de frères et soeurs. Mon grand frère vient de prendre sa retraite. Je pourrai donc y avoir droit aussi l’année prochaine mais chez les prêtres, c’est pas avant 75 ans.

Quels sont les sentiments qui vous habitent au moment où vous quittez le Burkina quand on sait que vous avez passé beaucoup de temps au Burkina ?

28 ans en trois séjours. Deux ans à Pabré, seize ans à Zaba et Dori et ces dernières années, à Arbinda, un an à Tansila et quatre ans à Koudougou. Ce que j’aimais dire c’est que ce sont mes plus belles années et je suis content de les avoir passées en Haute-Volta et au Burkina. J’ai eu la chance, depuis deux mois à peu près, d’avoir doucement programmé mon deuil et d’avoir pu rencontrer tous ceux que je souhaitais rencontrer pour qu’on se dise un bel au revoir. Il y a deux- trois jours de cela, j’étais à Arbinda et Dori pour saluer une dernière fois. De ce point de vue, c’est bien. C’est forcément un deuil parce que c’est une forme d’arrachement mais, il faut aller de l’avant, un missionnaire est appelé à tourner les pages. Je sais que l’aventure qui m’attend à Marseille sera passionnante aussi si ma santé me le permet.

Justement qu’allez-vous faire à Marseille ?

A ce qu’on m’a dit par courrier, ma spécialité va être la communauté africaine, les associations d’immigrés. L’immigration pour moi, n’est pas un sujet nouveau car depuis mes études à Strasbourg, je suis là-dedans. Mon mémoire de DESS à d’ailleurs porté sur l’immigration. J’ai été permanent d’une association pendant deux ans et, lors de mon premier séjour à Marseille de 1994 à 1998, j’étais beaucoup impliqué dans tout cela et maintenant, j’y retourne. C’est un sujet qui m’a toujours beaucoup travaillé. Même dans les forums sociaux j’ai toujours intervenu sur l’immigration. Les peuples qui bougent m’ont toujours passionné. Un peuple qui ne bouge pas, qui est replié sur lui-même, ce n’est pas intéressant. Les peuples qui bougent aujourd’hui sont des peuples qui souffrent. Il faut donc comprendre, analyser, aider, accompagner.

Y a-t-il possibilité qu’on vous réaffecte au Burkina ?

Une des limites qui me feraient dire spontanément non, c’est ma santé. Je suis cardiaque et diabétique ; il faut donc que je pense à me soigner un peu mieux que maintenant.

N’avez-vous pas peur d’être finalement dépaysé à Marseille après 28 ans passés au Burkina ?

Il y aura forcément un temps d’adaptation et le premier élément d’adaptation sera le prix des produits. Au début, on n’ose rien acheter tellement c’est cher. C’est une expérience que je fais à chaque retour de congés. Le décalage est grand par rapport à ici.

Peut-on s’attendre à revoir votre signature dans le journal de temps à autre ou bien la rupture est-elle définitive ?

Ma rubrique du mardi (ndlr : 26 mai 2009 avec comme titre "Ce soir, je prends l’avion") est la dernière. Vous ne verrez plus ma signature parce que quand on sort du milieu et tant qu’on n’est pas imprégné, qu’on n’a pas les réactions des gens, qu’on n’est pas proche de l’information, on ne peut pas écrire de la même façon. Ce serait trop générique, moins passionnant. Pour conclure, je me répéterai en disant que j’ai vécu l’aventure de l’écriture dans une publication régulière et cela pour la première fois. J’ai parfois écrit des articles ponctuels mais ce travail régulier, engagé, exigeant, c’est la première fois que je le vivais et j’en étais très heureux. Vous m’avez appris à me dépasser et à faire quelque chose que je n’avais pas encore fait. Merci beaucoup.

Pour un observateur un peu particulier comme vous, quel est le problème du Burkina aujourd’hui en termes de développement ?

Il faut de meilleurs leaders que ceux qui sont là aujourd’hui. Il faut, pour le pays, un grand projet qui inclut tout le monde pas seulement un petit projet qui n’inclut que les riches comme aujourd’hui ; d’abord les 80% de gens du monde rural. Il faut que ces gens-là soient soutenus pour que le Burkina s’enrichisse, pour qu’un marché intérieur se crée, pour que l’économie agricole se créé et pour que le Burkina décolle. Tant que les paysans n’auront pas un revenu pour leur travail, le Burkina ne décollera pas. Quand le ministre de l’Agriculture veut acheter le riz paddy à 115 F CFA le kilo, je trouve cela inconcevable parce que le riz paddy se vend à 165 F CFA le kilo. C’est le prix réel qui permet aux paysans de s’en sortir, de vivre du fruit de l’agriculture. A 115 F CFA le kilo, on ruine le paysan.

Que pensez-vous de la polémique suscitée par les propos du Pape Benoît XVI sur le préservatif ?

Tout le monde est d’accord qu’il faut un combat. Et vous connaissez peut-être la grande méthode qu’on appelle « la flottille de l’espoir » qui a été mise au point en Tanzanie il y a une quinzaine ou une vingtaine d’années. Le Sida est un déluge et il ne faut pas se laisser noyer. Il y a donc trois bateaux pour l’éviter ; un qui s’appelle fidélité, l’autre abstinence et le troisième préservatif. Quoi qu’il arrive, il faut rejoindre un bateau. C’est un père blanc de Tanzanie qui a inventé cela et l’ONU l’a même repris. En France, la plus belle déclaration qu’il y a eu là-dessus c’était celle d’un médecin qui avait dit à propos du préservatif : "Ce n’est pas le problème du préservatif. C’est le problème, pour un chrétien, de tenir compte de la morale chrétienne qui dit : n’ajoute pas le meurtre au pêché". C’est-à-dire que si tu pars sur un péché, que ce soit l’adultère, la fornication, quelque chose qui est puni par la foi chrétienne, n’ajoute pas le meurtre, ce qui veut dire "mets la capote". C’était une autre façon de parler de la transmission du Sida. C’était bien dit pour un chrétien qui aime les convictions chrétiennes. Maintenant, les médias occidentaux, qui sont très anti-catholiques et anti-papistes, se sont excités sur les quinze mots que le Pape a dits sur le préservatif. Mais c’est leur problème.

Un mot sur Sarkozy. Est-il, selon vous, l’homme de la rupture ?

Pour l’Afrique vous avez vu qu’il n’est pas l’homme de la rupture, qu’il est dans la pleine continuité de la Françafrique, des multinationales et du pillage de l’Afrique. C’est très clair que Sarkozy n’a rien changé et ne veut rien changer. Il a trop d’intérêts là-dedans. Sarkozy est l’homme de la continuité capitaliste, il est pour l’enrichissement des riches, a un profond mépris pour les pauvres. C’est un homme qui, pour préserver les riches, est prêt à supprimer les libertés du peuple. Je crois qu’on aura beaucoup à combattre même à Marseille par rapport à tout cela. Quelqu’un qui donne un sandwich à un sans-papier ou qui le prend dans sa voiture ou qui recharge son portable, peut faire partie des 5 500 que les policiers doivent arrêter l’année prochaine comme étant les aidants pour les migrants irréguliers parce qu’il y a des quotas.

Et Barack Obama ?

Barack Obama incarne une rupture dans un certain domaine mais on sent qu’il reste un peu prisonnier de tous les lobbies qui l’ont fait élire. On attend donc de voir.

Propos retranscrits par Christine SAWADOGO

http://www.lepays.bf/spip.php?article2110