par Ramata Sore
Souvenez-vous! C'était en 1998. Le Faso venait d’être bouleversé par l’assassinat de Norbert Zongo. Il eut un schisme. Une presse qui, sans ambages, a accusé Norbert d’avoir précipité sa propre mort. Une autre, qui s’inscrit résolument dans le sillage encore fumant de l’illustre «calciné», refusa de bâillonner sa plume. Mieux, elle a fait des émules.
Nonobstant les cabales contre cette presse, entre le marteau et l'enclume, les plumes se sont barricadées derrière les UNES. Elles ont voulu anticipé. Eviter «le même rituel sanglant.» Mais hélas, douze ans après Norbert, alors que l’on commémore année après années sa disparition, revoilà le 20 février 2011. Justin Zongo est mort. Et tantie Béa, présidente du Conseil supérieur de la Communication, ne veut pas comprendre cela. Elle ne veut surtout pas voir. Elle accuse une certaine presse d’attiser le feu. C’est de la calomnie médiatique! La question que doit se poser tantie Béa est de savoir pourquoi cette tempête révolutionnaire souffle-t-elle sur le Faso? Comment le pouvoir de Blaise a pu, encore une fois, commettre les mêmes erreurs alors que des précédents non résolus existent? La pluie éteint le feu. Pas un mot de compassion de Blaise à son peuple meurtri, à sa jeune étripée par des hommes en uniformes. Le contraire eût été étonnant. Depuis quand se dérange-t-il pour des «morts pareils» ! Si la rébellion s’enracine dans les villes du Faso, c’est que les techniques et tactiques de récupération qui avaient fonctionnées en 1998 sont épuisées. Elles sont inefficaces. Elles ne le seront plus jamais. Déterminée, la jeunesse refuse de se voir berner par le mensonge de la IVe République. La jeunesse ne veut plus être abusée. Elle se souvient encore du cas Norbert. Le peuple a usé ses sandales sur le macadam de la protestation. Il a crié et exigé justice et lumière pour Norbert Zongo. Le gouvernement a fait semblant d’écouter. L’éléphant a accouché d’une souris. L’abus a toujours une fin. Or tantie Béa le sait très bien : les medias sont la voix des sans voix. Ils amplifient leurs cris de détresse afin que qui de droit réagisse. En Egypte, durant la révolte, des personnalités des medias d’Etat ont faites défection. Ils ont entendu le cri de détresse du peuple. Ils sont redevenus leur porte-parole. Ils ont même titré, chose auparavant impensable: « Nous occuperons la Place Tahrir jusqu'à ce que Moubarak démissionne». Ils l’ont fait. Et Moubarak a démissionné. Tantie Béa, ministre de l'information et de la culture de 1989 jusqu'en 91, aux heures les plus noirs du régime Compaoré, avait su redorer le blason ensanglanté de Blaise, tenir en laisse les medias. Ca c’était sous le Front populaire. Maintenant nous sommes sous le front de la démocratisation. Au Faso, engagés, rémunérés par l'Etat et contrôlés par des espions du pouvoir en place, certains journalistes des medias publics sentent le vent de l’engagement: «On fera la bonne option en temps opportun...» m’a dit l’un d’eux. Les mesures prises par le gouvernement pour sanctionner tous ceux qui étaient de près ou de loin liées à la mort de Justin Zongo et de ses cinq camarades ne devraient pas être une exception. Elles doivent être la règle. Pourtant le gouvernement s’en sert pour tenter de calmer la colère de la jeunesse. Il faudra que la liane faite de fibres de corruption, de gabegie, de fornication tissées décennie après décennie par le régime de Blaise soit défait avec la même minutie qui a contribué a son tissage. La jeunesse veut l’équité. Elle exige la justice. Elle désire la liberté. Elle en a marre des sangsues qui affament le peuple. Elle ne veut plus de dialogue de sourd avec le gouvernement. Les étudiants en ont eu depuis des années. Mais l’université est restée un chao. Les syndicats, de concertations en concertations, à la fin ont été surpris par une vie encore plus chère. Simon Compaoré en a profité pour instaurer la TDC (taxe de développement communal)... Organisation. Mobilisation. Revendication. Resistance. Maturité. Tenir plus de 18 jours s’il le faut. Sans casse ni violence : le dictateur tombera ; balayé par la férule du peuple. Ce n’est qu’une question de temps. Juste une question de temps ! Tantie Béa, entends-tu ces cris? Ecoutes bien ce que cette jeunesse scande: «la justice nous vaincra». Et la presse est la pour le rapporter. Pas pour faire autre chose !
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