mercredi 29 avril 2009

Des "études" ruineuses et inutiles

Droit dans les yeux :

Agriculture, pauvreté et OGM…



Dans un pays où 80% de la population vit en milieu rural et vit directement ou indirectement de l’agriculture, j’ai envie de crier à l’escroquerie quand on parle d’une nouvelle enquête sur la pauvreté qui va, parait-il, coûter 2,5 milliards de francs… Les enquêtes ont été faites : la pauvreté a été analysée, décortiquée, mise en statistiques, décrite, inventoriée dans le « cadre stratégique de lutte contre la pauvreté », belle étude descriptive s’il en est ! Mais toujours, il y a une obstination têtue à refuser l’évidence. Si l’on veut lutter contre la pauvreté, il faut lutter contre ses causes, et surtout ses causes en milieu rural.

Juste après avoir quitté le pouvoir, Jacques Chirac disait : « L'autosuffisance alimentaire est le premier des défis à relever pour les pays en développement. Des outils existent. Nous savons tous ce qu'il faut faire : infrastructures rurales, stockage, irrigation, transport, financement des récoltes, organisation des marchés, micro crédit, etc.

L'agriculture vivrière doit être réhabilitée. Elle doit être encouragée. Elle doit être protégée, n'ayons pas peur des mots, contre une concurrence débridée des produits d'importation qui déstabilisent l'économie de ces pays et découragent les producteurs locaux.

…..Il faut miser sur les hommes, sur les producteurs locaux, qui doivent percevoir la juste rémunération de leurs efforts. Les échanges doivent obéir à des règles équitables, respectant à la fois le consommateur et le producteur. La libre circulation des produits ne peut pas se faire au détriment des producteurs les plus fragiles. »


Nous savons tous ce qu’il faut faire : alors pourquoi ne le faisons nous pas ? Pourquoi, les PTF, les donateurs, les bailleurs de fonds n’insistent ils pas sur ces actions élémentaires que réclament la CPF depuis toujours ? Pourquoi Monsieur Amos Tincani ne dit il pas plus clairement qu’au Burkina, on ne fera pas reculer la pauvreté si l’on ne soutient pas davantage l’agriculture ? Pourquoi le gouvernement refuse t il de financer le secteur agricole de manière conséquente ? Il faut financer et protéger l’agriculture comme le font tous les pays du monde : avec des subventions conséquentes, avec des prix rémunérateurs, avec des barrières douanières réalistes. Il faut imiter pour cela les grands pays développés et non écouter leurs stupides conseils d’ouvrir nos marchés : Le Japon n’a jamais voulu ouvrir ses marchés au riz étranger et il donne au Burkina ce qu’il est tenu d’acheter aux américains : il n’en veut pas chez lui pour ne pas déstabiliser ses riziculteurs !

Si vraiment 2,5 milliards de francs sont disponibles pour cette étude sur la pauvreté, invitons les bailleurs à reverser cet argent en crédit aux paysans… et ils éviteront le ridicule d’ajouter études sur études qui ne servent plus à rien tant qu’on ne s’attaque pas aux causes de la pauvreté…. Pour cela, écoutons les paysans !



Et il y a encore des gens qui prétendent que les OGM pourraient tirer le monde des famines et de la malnutrition. Les dernières nouvelles de ce côté-là sont pour eux particulièrement mauvaises :

= une étude américaine vient de prouver que sur 10 à 15 ans, les OGM (en particulier le maïs et le soja) n’améliorent pas du tout les rendements. Les cultures non OGM (comme le blé) voient leurs rendements progresser de la même façon sur la même période.

= Une autre étude vient de prouver aussi que les produits phytosanitaires utilisés (en particulier le Roundup) non seulement détruisent à long terme la fertilité des terres, mais qu’ils sont aussi particulièrement nocifs pour les populations : cancers, malformations congénitales, maladies allergiques diverses se révèlent dans toutes les localités proches d’épandage de ces produits par avion.

= un « bug » de laboratoire a fait livrer à l’Afrique du Sud des « semences OGM stériles » : des milliers d’hectares sont couverts de maïs sans épis ni grains ! Monsanto a promis de dédommager les agriculteurs trompés, mais il n’est pas sûr que les « billets verts » se cuisinent comme le maïs et nourrissent de la même manière. Le maïs OGM va-t-il devenir ainsi une arme de destruction massive dont disposent les multinationales semencières ?

= Enfin, un grand pays comme l’Allemagne vient de se ranger parmi ceux qui interdisent le maïs OGM tant les risques se révèlent de plus en plus violents pour les populations, l’environnement, la biodiversité et la dépendance.



Ne cherchons pas sur des fausses pistes des solutions qui nous sont toutes proches : pour lutter contre la pauvreté en milieu rural, ce ne sont pas des études nouvelles qu’il faut, ni des OGM, ni de l’agrobusiness….

Beaucoup de lecteurs me reprochent de n’être pas favorable à l’agrobusiness, mais que voyons-nous au Faso ? : Des personnalités proches du pouvoir, ou du pouvoir même, ou des opérateurs économiques prennent des terres où ils « jouent » à l’agriculture, car ils n’en ont pas besoin pour vivre. Ils bénéficient très souvent d’avantages que ne peuvent même pas espérer les paysans : matériels agricoles, tracteurs, intrants, exonérations diverses, main d’œuvre à bas prix… pour des résultats même pas significatifs, eux-mêmes n’étant pas paysans dans l’âme, n’aimant la terre que pour les bénéfices qu’elle pourrait rapporter, pas comme la mère nourricière. Ils espèrent ou même organisent des opérations spéculatives sur des terres qu’ils ont prises aux paysans. Qu’espérer de ces prédateurs : des récoltes plus abondantes, un respect de l’environnement… non, des profits, et pour cela des cultures de rentes tournées vers la vente à l’étranger. Et comme en Irlande en 1850, les paysans mourront de faim quand ces industriels agricoles exporteront leurs récoltes pour leur seul enrichissement. Est-ce ce modèle que nous voulons pour ce pays ?


Par contre, si les paysans pouvaient gagner sécurisation foncière, matériel agricole, tracteurs, intrants, exonérations aux mêmes conditions, s’ils étaient accompagnés pour vendre leurs récoltes, alors, il n’y aurait pas besoin de nouvelles « études » ruineuses et inutiles, alors la pauvreté reculerait dans les campagnes, alors l’espérance renaîtrait chez les paysans.


Père Jacques Lacour (BP 332 Koudougou)

jacqueslacourbf@yahoo.fr


publié sur le site du journal "Le Pays" du 28 avril 2009, rubrique "droit dans les yeux" à l'adresse suivante:

http://www.lepays.bf/spip.php?article1687

avec 8 messages de forum


mardi 21 avril 2009

Ces silences coupables

Droit dans les yeux :

Ne vous inquiétez pas…
On ne vous dit pas tout !

Lors d’un récent passage à Ouahigouya, j’ai croisé, pendant leur pause, quelques élus CDP qui y tenaient congrès. Rapide présentation, quelques échanges détendus… et très vite cette phrase, à propos de cette rubrique : « Mais, mon père, il ne faut pas tout dire ! ». Et bing ! C’est la deuxième fois que j’entends cette réflexion… et de la part de militants CDP.

Forcément, ça m’invite à réfléchir : est-ce moi qui suis visé, ou est-ce une certaine conception de l’information ?
Dès que je suis arrivé au Burkina, il y a deux principes que l’on m’a enseignés et qui, semble-t-il, régissent beaucoup de choses : « On n’entre pas dans le ‘6 mètres’ de quelqu’un d’autre » et cet autre : « on ne gâte pas l’affaire de quelqu’un d’autre ». Evidemment pour ce qui est de la stricte vie privée et tant que ça ne porte préjudice ni à quelqu’un d’autre ni à aucune institution, cela me paraît raisonnable… Mais il est loin d’en être toujours ainsi ; car je me suis aperçu que ces principes – largement appliqués -- couvraient de très nombreuses situations délictueuses et que cet appel culturel au silence entretenait de profondes injustices…

Il arrive ainsi que la gestion du pouvoir et des richesses de la nation soit entourée de silences coupables, de dissimulations plus ou moins subtiles, de « mensonges d’état » pour couvrir des situations que l’on espère garder secrètes le plus longtemps possible. (Mais cela est vrai aussi dans beaucoup d’associations et de groupes divers). Ah, ce culte du secret qui permet les arrangements et les magouilles, les tricheries et les privilèges, les passe-droits et les infractions, la corruption et les détournements. Ce silence là doit être brisé… mais il ne faut certainement pas compter sur les bénéficiaires pour le faire.

Dans une démocratie, c’est à l’opposition (si elle est libre vis-à-vis du pouvoir), c’est à la presse (si elle est libre) et c’est à la société civile (si elle n’a pas été fabriquée à la mesure du pouvoir et si on lui laisse le droit de s’exprimer) de briser ces silences coupables ; et pour toutes ces situations, il faut briser le secret, il faut entrer dans certains ‘6 mètres’ et dire des noms, il faut gâter l’affaire des délinquants et de ceux qui enfreignent les lois pour qu’ils soient corrigés ou se corrigent eux-mêmes.

Dans l’affaire des villas de la caisse (CNSS), la seule révélation de la Cour des comptes n’a pas suffi ; il a fallu qu’un journal révèle des noms pour que les citoyens puissent bien connaître l’affaire et sa portée. Alors le Premier Ministre, pourfendeur de toute corruption, puis le ministre du travail sont montés au créneau pour tenter de justifier ces situations injustifiables : des agents de l’Etat ont profité des richesses de l’Etat illégalement, en enfreignant les lois du pays. Mais nous dit le député Mahama Sawadogo, heureusement, il n’y a jamais eu de décrets d’application pour ces lois. Ainsi, nous avons des lois pour montrer à la communauté internationale que nous sommes un état de droit ; mais à l’interne, pas de décrets d’application, donc jamais de sanctions… et le tour est joué !
Merci dans ce cas à la presse d’avoir « tout dit », même si on sait d’avance que cela va recommencer avec les prochaines villas… (Avec sans doute un emballage plus discret.)

Dans la question de l’exploitation des ressources naturelles du Burkina, c’est la Société Civile entrainée par ORCADE qui essaie d’y voir un peu clair : Il faudrait « tout dire » pour que les citoyens comprennent ce qui est fait des richesses du pays : les contrats miniers, ce qui est réellement extrait, ce qui est versé à l’état, ce qui revient aux populations expulsées, le bénéfice pour les populations locales… Il y a tant de pays d’Afrique où le pillage par les multinationales et les dirigeants du pays est facilité par la dissimulation, le secret, le mensonge. La publication de tous les chiffres est attendue par les populations qui habituellement sont maintenues dans l’ignorance. Que Dieu bénisse le travail d’ORCADE et de tous ceux qui veulent savoir. Il ne pourra jamais exister de vraie conscience citoyenne tant que cette connaissance ne sera pas partagée et publiée. Le secret est alors un déni de démocratie : Oui, dans ce cas, il est bon de tout dire ! Mais le travail ne va pas leur manquer tant les résistances à la « transparence » sont grandes « en l’état actuel de nos états ».

Tant que les dirigeants n’y sont pas forcés dans notre pays, ils font de la rétention d’information, de la dissimulation… qui s’apparente parfois au mensonge d’état : ils ne veulent rien dire : de la « mort naturelle » de Thomas Sankara ou de l’ « accident » de Norbert Zongo, à l’implication du Burkina dans les guerres civiles de l’Angola, du Libéria ou de Sierra Leone… mais il y a aussi l’enrichissement « rapide et mystérieux » des proches du pouvoir dont les revenus connus n’y pourraient suffire… et le silence assourdissant des services des impôts et de la justice… pour ne citer que cela !

A ceux qui m’interpellaient : « mon père, il ne faut pas tout dire » ; je leur redis : « Ne vous inquiétez pas : on ne vous dit pas tout, même si vous êtes au CDP ! »

Père Jacques LACOUR (BP 332 Koudougou)
jacqueslacourbf@yahoo.fr




Ce texte a paru le mardi 21 avril dans la rubrique "droit dans les yeux" du journal "Le Pays", édition papier. mais également dans la version éléctronique à cette adresse (avec forum)
http://www.lepays.bf/spip.php?article1616
(article visité plus de 600 fois sur le site du journal)

mardi 14 avril 2009

Droit dans les yeux : Garder vivante l’Espérance…

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Droit dans les yeux :

Garder vivante l’Espérance…


Celui qui guette l’information chaque jour pour essayer de comprendre comment marche le monde, pourquoi l’injustice l’emporte si souvent, pourquoi les plus petits sont écrasés sans avoir droit à la parole, celui là est souvent guetté lui-même par la tristesse ou le découragement, par la révolte ou la colère.

Dans un monde où les forces de mort l’emportent si souvent, comment ne pas se décourager ou tomber dans la fatalité… et parfois même d’accuser Dieu de tout laisser faire ainsi.


Dans la vie de tous les jours, chacune, chacun d’entre nous est confronté à ce qui ne va pas… et cette rubrique, chaque semaine, pointe un petit aspect dans notre monde, dans notre société, de ce qui, peut-être, pourrait être corrigé, amendé, amélioré…

Parfois le vertige du découragement me saisit… et beaucoup de « braves gens », pleins de « bon sens », me disent : « Mon Père, il ne faut pas penser à tout ça, c’est trop tragique… ». D’autres, par contre, mesurent soudain le tragique de certains évènements, comme ces catéchistes à qui nous avions fait découvrir les situations très difficiles que vont faire naître les changements climatiques : « Mais, mon père, ceux qui réfléchissent à tout ça, est ce qu’ils peuvent encore dormir… ? »

Par peur du vertige, on peut fermer les yeux ; par lucidité, on peut accepter de mal dormir.


Quand on commence vraiment à comprendre comment marche notre monde, et les puissants ne souhaitent pas que nous comprenions vraiment…

Quand on commence à comprendre comment l’égoïsme l’emporte sur la générosité, la privatisation et l’accaparement par quelques uns sur le bien commun,

Comment l’avidité l’emporte sur la solidarité, la richesse de quelques uns sur la ruine des états et des pauvres,

Comment la violence l’emporte sur la tolérance, violence mise au service d’intérêts inavouables,

Comment le mensonge l’emporte sur la vérité, pour le profit de quelques uns, la haine sur l’amour, la jalousie sur la joie,

Alors, on se dit au fond de son cœur :

« Non, ça ne durera pas toujours ainsi,

Non, ça ne peut continuer comme cela indéfiniment ! »

Ce n’est pas ce monde là que nous désirons, ce n’est pas dans ce monde là que nous voulons vivre, ce n’est pas ce monde là que nous voulons laisser à nos enfants.


A ce moment là, si nous ouvrons bien les yeux, nous voyons se lever des témoins qui désirent un monde autrement, qui y consacrent leurs vies, souvent sans bruit ni tintamarre. Beaucoup trouvent souvent en Dieu la force qui fait tenir debout même dans l’épreuve. Ils ne sont pas meilleurs que nous, mais ils osent s’engager, chacun à leur manière, selon le don qu’ils ont reçu et ils nous laissent entrevoir d’autres horizons.


Alors, quand plus rien ne semble aller, quand les puissances d’argent, d’asservissement et de mort semblent l’emporter, une espérance demeure, une espérance reste vive, chantée chaque soir par les prêtres et les religieuses :

« Il renverse les puissants de leur trône,

Il élève les humbles.

Il comble de biens les affamés,

Il renvoie les riches les mains vides… »

L’Auteur de ce monde, parce qu’il l’a créé par amour, ne cesse de veiller sur lui et Il le conduira vers la Vie.


Oui, en ce temps de Pâques pour les croyants de la communauté chrétienne, une certitude habite leur vie toute entière :

Non, ça ne durera pas toujours ainsi,

Un jour la Justice l’emportera

Un jour la Vie l’emportera.

Et cela donne sens à nos engagements aujourd’hui.



Père Jacques LACOUR (BP 332 Koudougou)

jacqueslacourbf@yahoo




Publié dans le Journal "Le Pays", rubrique "droit dans les yeux" du mardi 14 avril 2009

et sur le site du journal, à l'adresse suivante:

http://www.lepays.bf/spip.php?article1547


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dimanche 12 avril 2009

Jour de Pâques

Pâques





(extraits de la Revue Prier)

samedi 11 avril 2009

Pâques: Il est vivant!

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Il est vivant, nous vivrons avec Lui!


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lundi 6 avril 2009

Droit dans les yeux : La Journée du Paysan.


Droit dans les yeux :

La Journée du Paysan.



Je suis bien content, cette année, que la journée du paysan se déroule à Koudougou : je vais pouvoir y assister un peu. Journée qui fut longuement préparée et que bon nombre de mes amis paysans appellent : « la journée du président ».


Ma plus grande surprise, quand je me suis rendu à l’Université pour les discours officiels, c’est de voir le nombre de 4x4 sur le parking de stationnement. Vraiment, on aurait pu croire que c’était le salon du 4x4 de Koudougou ! Je ne me rappelle pas avoir vu tant de 4x4 rassemblés au Burkina, et pourtant, j’y suis depuis près de 30 ans ; et toutes les marques étaient représentées, et tous les modèles jusqu’aux plus luxueux. Ce ne sont quand même pas les paysans qui roulent habituellement en 4x4 !


Les chauffeurs m’ont expliqué que ce sont les personnels de tous les services convoqués qui ont rempli l’amphi depuis le matin… Ainsi donc, il n’y a pas que les paysans. Loin de là.

Je resterai au dehors avec une foule de paysans pour qui, bien sûr, il n’y avait plus de place… Mais comme c’était bien sonorisé, ça allait quand même : le président, on peut toujours le voir à la télé.


Le ministre de l’agriculture s’est publiquement réjoui de l’augmentation de la production, mais il a plus loué les aides ponctuelles de l’Etat que la peine et la sueur des paysans. Les paysans ont produit vraiment plus, sauf pour le coton qui a baissé de 31%… Depuis le temps qu’on essaie de faire comprendre au ministre qu’un prix rémunérateur pour le paysan le motivera bien plus que toute autre chose. Si la filière riz a tant produit cette année alors qu’elle était en faillite, c’est d’abord parce que le prix du riz a monté. Et comme le prix du coton baisse, la production baisse – quelles que soient les aides à la filière… C’est d’une telle limpidité…



Dans le discours du Président, deux choses m’ont frappé :

Il a très peu parlé des paysans, il parlait des « acteurs et actrices » du monde rural… A-t-il honte du mot paysan ? Ou voulait-il s’adresser aussi à ses nombreux auditeurs dans la salle qui n’étaient pas paysans ? Il y a là un glissement qui déçoit quand même beaucoup : la journée du paysan ne devient-elle pas ainsi la journée de ceux qui tournent autour des paysans (avec leurs 4x4) ?

Par contre, par deux fois, il a parlé de « souveraineté alimentaire ». (C’est nouveau et c’est bon signe). Pas seulement de « sécurité alimentaire » comme il le fait toujours largement, mais de « souveraineté alimentaire », ce droit des peuples à produire la nourriture qu’ils veulent consommer … et de manière durable.


Il a invité les paysans à bouger dans un monde qui bouge : les contraintes sont nombreuses, les défis sont immenses… il faut s’adapter continuellement.

Mais les paysans attendent désespérément que les gouvernants bougent, que les législateurs bougent, que l’administration bouge : A quand la « loi d’orientation agricole » ? A quand la sécurisation foncière de ceux qui travaillent la terre ? A quand l’accompagnement de la mise en place d’un vrai circuit d’approvisionnement pour les intrants ? A quand un vrai budget de l’agriculture et qui cesse de n’être exécuté qu’à moitié chaque année alors que les besoins sont si immenses ? Les paysans vous regardent : c’est vous qu’ils attendent de voir bouger.


Un petit tour à la foire agricole a tout simplement montré que les paysans sont capables de produire de tout dans tous les domaines, et d’abord pour alimenter les marchés locaux qui deviennent source de richesses pour tous… Ils s’adaptent, ils diversifient, ils répondent aux besoins locaux. Sans marché intérieur alimenté par les paysans, comment serait-il possible de faire reculer la pauvreté ?


Les conclusions des ateliers et des forums ont montré qu’un réel travail de réflexion a été accompli, mais qu’en restera t il dans 15 jours, dans deux mois ? Quel suivi y aura-t-il pour toutes ces suggestions et ces propositions qui sont répétées chaque année, inlassablement,… et en cours d’année par les organisations paysannes, inlassablement ? Qui écoute vraiment les paysans au long des jours ?


Pourtant, les organisations paysannes ne cessent de faire des analyses, des suggestions et des propositions qui sont très peu entendues. Ce sont des groupes restreints de hauts fonctionnaires, d’experts et de décideurs qui élaborent, bien loin des paysans, les « politiques agricoles », successions peu cohérentes et sans vraie suite de projets, de programmes, de plans d’action et autres qui permettent, entre autres, l’achat de tant de ces 4x4 inutiles.


Reprenant un des derniers messages de plaidoyer de la CPF (Confédération Paysanne du Faso), je lis :

« … La part des dépenses publiques consacrées à l’agriculture est très faible… La mise en place d’une politique nationale de financement du monde rural était un objectif initial, mais oublié en cours de route… Le Plan d’Action/Organisations Professionnelles Agricoles (PA/OPA) reste un échec unanimement admis…

Il est urgent, par une loi d’orientation agricole, de définir une vision claire et partagée à long terme de l’agriculture par l’ensemble des acteurs, de créer un consensus entre les acteurs économiques de l’agriculture, la société et les pouvoirs publics, d’entretenir un message de confiance en l’avenir du monde rural et agricole et de moderniser notre agriculture…

Parmi les priorités, il faudrait traiter le financement de l’agriculture familiale, le budget affecté à l’agriculture, le statut du paysan et la protection sociale… »


A la tribune de l’ONU, le chef de l’état, en septembre 2008 déclare ceci : « La crise alimentaire que le monde vit a suffisamment montré l’inconséquence de nos politiques agricoles et la fragilité de nos systèmes de production et de commercialisation ; il est urgent de relancer les investissements en faveur de l’agriculture et de soutenir les organisations paysannes et professionnelles dans des partenariats innovants. »

Est-ce un discours à usage interne ou à usage externe ?


Père Jacques Lacour (BP 332 Koudougou)

jacqueslacourbf@yahoo.fr


(Ce jour là, j’ai porté une chemise en pagne de la CPF ; c’est rare que je porte une « chemise publicitaire », mais ce jour-là, j’en étais fier !)


Ce texte a été publié dès le lundi 6 avril à 21heures sur le site internet du Pays, rubrique "Droit dans les yeux"

vendredi 3 avril 2009

Changer ?

Changer

laurent joffrin

Le monde ne changera pas tout seul : tel est le véritable enjeu de ce G20 réuni à Londres aujourd’hui. Il est en effet un cliché dont il faut se débarrasser : la crise va bouleverser les structures du capitalisme contemporain. Funeste illusion. Le but politique des classes dirigeantes occidentales, il faut bien le savoir, se situe exactement à l’inverse. Pour elles, la récession qui s’est déclenchée il y a six mois n’est qu’une parenthèse désagréable qui doit aboutir à la restauration de l’ordre ancien. Le cycle ouvert par la victoire de Ronald Reagan en 1980 a créé un paradis pour les riches. Inégalité vertigineuse des revenus, baisse spectaculaire des taux d’imposition, retrait de la puissance publique et affaiblissement continu des valeurs collectives : c’est le monde qui s’est construit en trente ans sous la férule du tout marché. C’est le monde que les puissants veulent conserver à tout prix.

Pour y parvenir, ils sont prêts à toutes les concessions verbales. C’est la vieille maxime du Guépard: pour que rien ne change, il faut que tout change. De cette ruse probable de l’Histoire, on trouve un exposé lumineux dans un livre à paraître que chacun doit méditer, pondu par le Cercle des économistes et intitulé Fin de monde ou sortie de crise ? Les grandes démocraties peuvent se contenter d’injecter des liquidités dans l’économie et de toiletter les règles qui régissent le secteur financier. C’est la «sortie de crise». Elles peuvent aussi, écoutant l’aspiration des plus modestes, rétablir l’équilibre mondial entre solidarité collective et avidité individuelle. Dans ce cas, il leur revient de réformer les systèmes fiscaux dans le sens de la justice, de créer un secteur public financier qui rende aux peuples la maîtrise de la monnaie, d’instaurer une gouvernance européenne et mondiale de l’économie pour encadrer «l’exubérance irrationnelle des marchés», de réformer et d’étendre l’Etat-providence, de mettre fin au gaspillage dangereux des ressources de la planète. Dans ce cas, nous changerions progressivement de monde. Le haut de la société n’en veut pas. Les peuples le demandent : rarement réunion du G20 aura été aussi politique.

Économie 02/04/2009 à 06h51 Libération

EVANGILE ET FINANCE

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A l'occasion du carême, il m'a été demandé de préparer un petit document de réflexion sur "Évangile et finances"; il fait 11 pages, c'est un peu long... Mais si quelqu'un était intéressé, le voici:


ÉVANGILE ET FINANCE

INTRODUCTION :
COUP D’ŒIL SUR LA FINANCE AUJOURD’HUI.

En ces temps où une crise financière tragique secoue le monde entier, il est bon de s’arrêter un peu pour comprendre ce qui se passe et comment nous en sommes arrivés là.

Les maladies qui ont touché la finance

La finance s’est peu à peu déconnectée de l’économie réelle, ce qui veut dire :

- elle s’est déconnectée des flux de marchandises et des services réels
- elle s’est déconnectée des investissements et des prêts aux entreprises

Elle a fonctionné de plus en plus pour elle-même, jouant de plus en plus sur les taux de changes, mais surtout en créant des « produits financiers » de plus en plus compliqués, fondés sur des créances et des dettes insolvables.

Que la puissance financière anglo-saxonne a pu injecter dans toutes les places financières et toutes les banques du monde à la faveur d’une dérégulation et d’une suppression des contrôles qui frisent l’escroquerie, mais qui est en tous cas, une grave régression de société.

lire la suite:
http://docs.google.com/Doc?id=dhbmqxzm_44dq3xhqf8



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CRIMINALISATION DE LA PAUVRETE

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CRIMINALISATION DE LA PAUVRETE

A Quissac, trois individus ont été arrêtés lors d’une récupération de nourriture dans les poubelles d’un supermarché. Le déroulement de cette arrestation fut complètement démesuré : braquage, demande de se mettre au sol, plaquage sur les capots des voitures, menotte, provocation…
Elle a été suivie d’une garde à vue, la soustraction de nourriture dans les poubelles étant considérée exactement au même titre qu’un vol.

Le lendemain matin, cette garde à vue a été accompagnée d’une perquisition sur le terrain privé qui leur est prêté. Rien de reprochable n’a été constaté. Malgré ça, ils se retrouvent sommés de quitter les lieux au plus vite, ainsi que six autres personnes vivant sur le terrain.
Pourtant il semblerait totalement absurde que qui que ce soit se fasse expulser de chez lui suite à un vol en supermarché. Ou même qu’un squat se voit menacé d’expulsion suite à l’arrestation d’un de ses occupants pour récupération de nourriture dans les poubelles…

Aussi, la prise d’ADN désormais systématique à toute accusation et même suspicion (excepté pour les délits financiers !) est imposée aux trois accusés. (Notons qu’un prélèvement coûte au contribuable 400 euros par fiche et que l’on comptait déjà 800 000 fiches par an en 2007)
Soucieux de ce qu’implique cette nouvelle mesure au niveau des libertés de l’individu et de l’application de la justice, l’un d’entre eux refuse cette prise d’ADN.
Il se voit alors convoqué au tribunal de Nîmes pour ce refus considéré comme un nouveau délit…

Au jour où les grandes surfaces jettent impunément des quantités hallucinantes de nourriture en excellant état, et où la récupération de ces déchets devient un délit, il devient impératif de se mobiliser contre ce gaspillage et cette criminalisation de la pauvreté.
Mobilisons-nous contre la criminalisation de la pauvreté et le fichage systématique et généralisé. Rejoignez le comité de soutien des « voleurs de poubelles ! »

Contact :
voleursdepoubelles@laposte.net

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jeudi 2 avril 2009

Avec Sarko, la solidarité est un délit

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http://www.delinquants-solidaires.org/

Alors, si la solidarité devient un délit, nous demandons à être poursuivis pour délit !*


Si le Gouvernement a largement communiqué sur les objectifs de reconduites à la frontière, les chiffres concernant les interpellations d’aidants sont restés quant à eux dans l’ombre des annexes aux Projets de lois de finances. Pourtant ils existent : ils sont de 5000 pour 2009
et 5 500 pour 2011.
Ces chiffres sont téléchargeables à cette adresse :
http://www.performance-publique.gouv.fr/farandole/2009/exercice2009_immigration.htm
Télécharger PLF2009_BG_IMMIGRATION.pdf


Nous sommes tous concernés par ces objectifs chiffrés, parce qu’ avant d’être «sans-papiers», ces hommes, ces femmes et ces enfants sont des personnes en difficulté, isolées et démunies et il est de notre devoir de citoyen de les aider dans la dignité et le respect dû à chaque être humain.

Mercredi 8 avril 2009, à 13h00,

à Paris, Lille, Marseille, Strasbourg, Lyon, Bordeaux, Toulouse, Rennes et dans des dizaines d'autres villes en France, nous serons 5 500 au moins à nous présenter comme prisonniers volontaires, affirmant avoir, un jour, aidé un homme ou une femme sans-papiers en difficulté. Nous serons 5 500 citoyens décidés à rester des « aidants » !

MOBILISEZ-VOUS !

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De nombreuses organisations ont rejoint la mobilisation au fil des jours. En voici la liste complète :

Emmaüs France / Association Emmaüs / La Cimade / Gisti / Comede / Fédération entraide protestante / UNIOPSS / RESF/ FASTI / Secours Catholique / FNARS / Syndicat des avocats de France / SOS Racisme / Dom’Asile / Ligue des Droits de l’Homme / MRAP / Association Toits du monde – Orléans / SALAM Nord/Pas-de-Calais / ACASEA / Agir Ensemble pour les Droits de l'Homme / France Terre d’asile / Fédération Sud Education / Médecins du Monde / ATD Quart Monde / Réseau Chrétien immigrés / Sud Education / Migration santé Alsace / ADDE (Avocats pour la Défense Des Droits des Etrangers) / CLARA (Comité national de coordination des associations d'accompagnement des migrants) / MPEF ( Mission Populaire Évangélique de France) / Osiris / ADN (Association pour la démocratie à Nice) / Terre d'errance / Fédération Syndicale Unitaire / Fédération Jeunes errants / les amoureux au ban public / Les petits Frères des pauvres / ATTAC France / Le Collectif National Droits de l’Homme Romeurope / Centre Social Aires 10 / Migrations Santé Alsace / AIDES


......