mardi 31 mars 2009

Droit dans les yeux : Quand l’hôpital Yalgado réfère ses patients au privé

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Quand l’hôpital Yalgado réfère ses patients au privé



Je connais bien mademoiselle N… qui a eu de graves ennuis de santé et que notre communauté a aidé à accéder aux soins.

Comble de malheur, elle a été heurtée et renversée par une moto.
Gravement blessée au bras (2 fractures) et au visage (deux fractures aussi), elle a été évacuée à Ouagadougou sur l’hôpital Yalgado et accueillie dans le service de chirurgie maxillo-faciale du docteur Dieudonné Ouédraogo, après un passage en traumatologie où son bras a été soigné.

Décidé à continuer à l’aider dans son malheur, je lui ai rendu visite dans ce service où elle m’a expliqué que la double intervention qu’elle devait subir (mâchoire et arcade sourcière) coûterait 78.000 F + 98.000 F soit 176.000 F (tarifs de l’hôpital public de Bobo-Dioulasso). Mais que le docteur venait de lui dire qu’il serait préférable – pour la bonne réussite de l’opération – que l’intervention ait lieu en clinique privée où cette même intervention coûterait 350.000 F, soit le double.

Sortant de sa chambre, je rencontre le docteur Dieudonné Ouedraogo, chef de ce service qui me confirme les paroles de N…. Il est préférable qu’elle soit opérée en clinique à cause d’un « manque de logistique pour assurer l’opération dans de bonnes conditions » à l’hôpital. Je n’ose pas trop poser de questions face à une affirmation aussi péremptoire.

Quelques instants plus tard, dans l’enceinte même de l’hôpital, je rencontre par hasard un ami médecin à qui je parle de cette affaire : Il me dit très clairement qu’il y a des disfonctionnements dans ce service : Quel manque de logistique empêcherait l’opération à l’hôpital ? Opérer en clinique rapporte deux fois plus qu’opérer à l’hôpital ; voilà, me dit-il, le seul problème. J’ose à peine y croire…

Du coup, me rappelant la campagne médiatique actuelle sur « Yalgado, hôpital de référence du Burkina », je ne comprends pas bien qu’on doive se référer au privé pour un tel cas : « A Bobo, ces opérations se pratiquent couramment à l’hôpital », me confirme-t-on.
L’urgence étant de bons soins pour mademoiselle N…, « je me patiente » avant de me renseigner plus en profondeur.
Finalement N… est opérée par le docteur Dieudonné Ouédraogo à la clinique FATIMA pour la modique somme de 312.000 F (opération seule) sans les examens divers et tous les actes secondaires systématiquement facturés… soit un « modique » surcoût de 136.000 F (au bas mot) par rapport au prix connu de l’hôpital public…

Désirant mieux comprendre cette situation, je me suis mis à prendre des renseignements un peu partout et voilà les deux questions que je me pose aujourd’hui :
= Certains services de l’hôpital Yalgado sont ils si sous équipés, manquent ils tant de logistique que les malades doivent être dirigés vers des cliniques privées ? Même quand ils ont reçu un bloc tout neuf ?
= Les cliniques privées manquent elles tellement de malades qu’elles soient obligées de détourner ceux de l’hôpital… et cela, au prix fort pour les malades parfois incapables de payer ?

Avec tous les burkinabè, nous aimerions tellement que l’hôpital Yalgado devienne ou redevienne le véritable hôpital référent du Burkina, accessible à toutes et à tous, à un prix raisonnable et pour les soins les meilleurs.

Que Dieu entende notre prière, mais aussi et surtout tous ceux qui sont concernés !

Père Jacques Lacour (BP 332 Koudougou)
jacqueslacourbf@yahoo.fr

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Cet article a été publié dans la rubrique "Droit dans les yeux" du journal "Le pays" du mardi 31 mars 2009 (allégé du nom du docteur et de la clinique privée...) à l'adresse suivante:

http://www.lepays.bf/spip.php?article1415


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