Pourquoi tout est il toujours à Ouagadougou ?
J’ai accompagné il y a quelques mois une équipe de télévision et des leaders paysans qui souhaitaient visiter la vallée du Sourou et ses aménagements hydro agricoles, un grand projet dont on parle beaucoup… et même au-delà de nos frontières.
En découvrant le site, ils me dirent : « C’est ça ? »… où sont les routes ? Où est l’électricité ? Où sont les infrastructures des nouveaux villages ? Y a-t-il un médecin dans la vallée du Sourou ? Pourquoi avoir déplacé tant de populations – dont beaucoup ont déjà fui – pour si peu ?
Ce jour là aussi, trois moteurs thermiques des pompes d’irrigation venaient de tomber en panne. Tombés en panne en même temps ! Et personne ne semblait se poser de questions sur leur éventuelle cause commune : huile ou carburant frelatés, entretien pas fait à temps, matériel complètement obsolète ou amorti… vite des pompes de secours avaient été louées (au bénéfice de qui ?) et mises en service pour éviter que la production ne soit compromise : Là aussi, pas de pièces de rechange disponibles, pas de garage digne de ce nom ! (Évidemment, il n’y a même pas l’électricité !)
Si, de l’électricité, il y en a un peu à Nyassan où nous avions passé la nuit : un peu pour la direction, un peu pour le centre d’accueil, mais pas pour les paysans, pas pour les artisans, pas pour le village…
Certains optimistes convaincus me diront que les choses ont progressé : Au début des années 80, pendant la période faste du haricot vert, il y a 25 ans, c’était pire ! Pourtant mises à part les routes, je n’en suis pas sûr du tout !
Seulement voilà, depuis 25 ans, l’essentiel des investissements du pays s’est fait à et pour Ouagadougou. Et même les grands barrages de la Kompienga (électricité pour Ouagadougou) ou de Ziiga (eau pour Ouagadougou) ont été conçus en fonction de la seule ville de Ouagadougou. Et à Ouagadougou, en 25 ans, tout a changé ! Parce qu’effectivement cette ville absorbe à elle seule presque toute la richesse nationale (Quel monstrueux déséquilibre et quel mépris pour les habitants du Burkina profond !)
Facile de comprendre alors pourquoi tout le monde veut s’installer à Ouagadougou. Pas un seul fonctionnaire, pas un seul opérateur économique qui ne rêve de sa concession à Ouagadougou puisque toute la richesse du pays s’y trouve concentrée. Et tous les jeunes du pays y affluent espérant les miettes de cette richesse accumulée. Et une foule de maires d’autres communes y résident en permanence, préférant Ouagadougou évidemment puisque tout y est !
Eau, électricité, soins, routes, enseignement, services administratifs incontournables, ADSL, transports, tout est à Ouagadougou !
Alors qu’il y a tant de villes moyennes et de villages qui attendent le minimum… tant de villages où l’accès à un médecin est impossible en saison des pluies et si lointain en saison sèche : A Aribinda, il faut faire 90 km pour trouver le premier et les habitants de la vallée du Sourou doivent continuer à aller jusqu’à Tougan !
Et pourtant, un peu d’électricité et quelques infrastructures élémentaires bien adaptées dans la vallée du Sourou auraient permis un réel développement intégré et durable de cette zone si fertile mais qui ne semble intéresser l’administration centrale et nos dirigeants politiques que lorsque s’y déroulent de grands travaux rémunérateurs !
Père Jacques Lacour - Koudougou - ( jacqueslacourbf@yahoo.fr )
(Cet article est paru dans l'édition papier du journal "Le Pays" de ce jour, mais n'a pas été repris dans dans l'édition électronique ni donc sur le fasonet...)
mardi, 11 septembre 2007 -
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire